Exposition : on peut tout faire avec un Bic

Exposition : on peut tout faire avec un Bic

Stylos mais aussi briquets ou rasoirs, une exposition regroupe 150 œuvres réalisées avec des produits de la marque. Étonnant et réjouissant.

Transparent ou quatre couleurs, il a toujours fait partie de notre vie. Le stylo Bic, né en 1950 et fabriqué à 15 millions d’exemplaires par jour, sert aussi bien à prendre des notes qu’à envoyer des boulettes ou fixer un chignon. Il est aussi à la pointe de l’art. Preuve par l’exemple : l’exposition au Centquatre-Paris, qui dévoile 150 œuvres de la collection Bic, démarrée dans les années 1990. Un parcours qui transporte de surprise en surprise, à la fois réjouissant, ludique et séduisant.
L’entrée en matière, passée quelques affiches historiques, donne le ton. Cet élégant paravent très Art déco, tout en transparence bleutée ? Il est composé de 600 stylos. La très design lampe « Anémone » ? Une flopée de Bic rouges. Ce fauteuil jaune et blanc ? Il a été créé grâce à plus de 1 100 rasoirs jetables, autre spécialité de la marque. Quant à la robe à longue traîne d’Oscar Carvallo, elle est toute cousue de briquets…
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Le couturier Oscar Carvallo a conçu une robe recouverte de 8 521 briquets./LP/Delphine Goldsztejn

Plus classique sur le fond mais pas sur la forme, la galerie des portraits surprend autant qu’elle impressionne. Ce visage de femme sous la douche, hyperréaliste, quasi photographique, réalisé avec un Bic ? Comme celui que j’utilise tous les jours ? Même interrogation pour le dessin de cet homme, à demi allongé sur une couverture verte, entouré de coussins rouges, sur fond de papier kraft. Oui, il a bien été réalisé avec le même stylo quatre couleurs qui se retrouve dans les trousses des écoliers. Mais il n’est pas simplement question, ici, de performance : les œuvres touchent, émeuvent ou questionnent comme toutes les autres.

 

Toiles, sculptures et installations

Les plus grands noms de l’art s’y sont aussi frottés : en 1967, René Magritte signe son autoportrait au stylo bleu. Alberto Giacometti croque son frère. César s’amuse à griffonner un volatile. Lucio Fontana, chose rare, esquisse un nu, et Fernand Léger prépare son tableau « La Colombe » d’un trait alerte. Tous sont présents ici.
L’art de Bic se décline aussi en sculptures, comme avec « Moon », œuvre constituée de stylos simplement plantés dans un mur, ou ce briquet géant orné des photos de Warhol et Mondrian. D’autres artistes ont décidé de ne travailler que sur la profondeur du bleu du stylo Crystal ou de n’extraire que l’encre, à la luminosité si particulière, pour évoquer des paysages ou construire des motifs géométriques.

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« Le Bic s’est imposé très tôt à moi, quand je cherchais ma voie. C’est le stylo qu’on a tous dans son sac. C’est simple, accessible, même pour ceux qui n’ont aucune culture artistique, raconte l’artiste Anne-Flore Cabanis, dont une des toiles, immense tracé labyrinthique, est exposée. Cette facilité permet une vraie liberté d’expression. La couleur bleue est aussi très intéressante : elle évoque la profondeur, la mer, le ciel. On peut faire à peu près tout ce qu’on veut avec le Bic. La seule limite, c’est la quantité d’encre dans le réservoir. »

 

«Un voyage dans l’enfance»

Installée au Centquatre-Paris, lieu de vie ouvert, l’exposition gratuite fait aussi rimer Bic avec démocratique. « Nous voulions être accessibles à tous les publics, avec un événement convivial. Comme chacun a une proximité, une intimité avec ce stylo, l’art devient plus accessible. Nous avons voulu montrer tout ce qu’il était possible de faire avec un Bic, et cela peut paraître parfois incroyable, mais aussi décomplexer le public », assume Ingrid Pux, l’une des commissaires de l’exposition.
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Dès les années 1950, des artistes ont utilisé le stylo Bic./LP/Delphine Goldsztejn

Venus en famille ou en solo, souvent le nez collé aux œuvres, les visiteurs oscillent entre vrai étonnement et petite nostalgie. « Arriver à faire des tableaux pareils avec un simple stylo, ça me laisse sans voix. Je suis ébahie », s’enthousiasme Danielle, 52 ans, venue du XVIIIe arrondissement tout proche. « Pour moi, c’était aussi une sorte de voyage dans l’enfance. Le quatre couleurs, c’était le trésor de nos trousses de gamins », s’émeut Luc, 33 ans, lui aussi Parisien. Pour tous, une chose est sûre : en sortant du Centquatre, impossible de regarder son stylo Bic tout à fait de la même façon.

 

Dessiner avec un Bic, c’est compliqué ?

Forcément, au sortir de l’exposition sur la collection Bic, le stylo démange un peu. Sans vouloir atteindre les performances techniques des artistes, on se dit que l’on pourrait tenter de s’en inspirer. Avec l’idée que c’est tout de même beaucoup moins intimidant que pinceaux, couleurs et toiles…
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« Mother and Son », un portrait au stylo Bic réalisé par le dessinateur ghanéen Enam Bosokah./LP/Delphine Goldsztejn

Pour vous y aider, le Centquatre-Paris propose le samedi 5 mai, à partir de 11 heures, un atelier – rencontre avec l’artiste Anne-Flore Cabanis, baptisé « Bic ton portrait ». Parfait, et gratuit, pour les enfants de 5 à 10 ans (de 2 à 5 € pour les accompagnants).
Mais plusieurs ouvrages peuvent aussi vous servir de guide. « L’art du stylo à bille », de Matt Rota, est sans doute le plus complet, à la fois livre d’histoire de l’art et manuel d’apprentissage (Ed. Eyrolles, 25 €). Plus simple et facile d’accès, « L’art du dessin au stylo-bille » (Ed. Dessain et Tolra, 9,95 €) peut convenir à toute la famille. Pour les plus petits, dès 6 ans, le même éditeur publie « 1 001 dessins faciles à la japonaise » (8,90 €) à réaliser essentiellement au stylo à bille. A vous de jouer.
« La collection Bic », au Centquatre-Paris, 5, rue Curial dans le XIXe arrondissement. Jusqu’au 27 mai. Ouvert du mardi (sauf le 1er mai) au vendredi, de 14 heures à 19 heures. Le week-end de 12 heures à 19 heures. Gratuit. www.104.fr